Il continue : « il n’existe aucune théorie permettant de l’appliquer et de développer un pays » !
Et moi qui avais fait des milliers de kilomètres depuis Douala au Cameroun, passé par Odessa, Moscou puis Rome, pour venir apprendre les modèles mathématiques qui permettent en économie de développer un pays, j’apprends que cela n’existe pas et surtout, que cela n’a jamais existé.
L’enseignant nous dit qu’en réalité, l’expression de théorie de Développement économique est réservée aux politiciens, qui peuvent ainsi utiliser des expressions qui ne veulent rien dire, pour promettre à leurs électeurs des choses qu’ils ne pourront pas tenir.
Et nous alors ? Nous sommes venus ici apprendre quoi ?
« Les économistes parlent plutôt des théories du Sous-développement, car s’il est vrai qu’aucune théorie ne permet à un pays de se développer, le rôle de l’économiste est plutôt celui d’examiner et de connaître les mécanismes qui permettent de tenir sous-développé une région, un pays ou même tout un continent comme l’Afrique », nous dit l’enseignant.
Et l’enseignant de nous dire en quoi consistera son cours tout au long de l’année, en concluant nous verrons au final pourquoi :
« Les dirigeants africains n’ont aucune chance de développer l’Afrique »
Vous aussi vous êtes curieux, comme moi ce jour-là, de comprendre le mécanisme de sous-développement de l’Afrique ?
Il y avait plusieurs auteurs et donc des livres conseillés par l’enseignant italien ce jour-là. Et un de ces auteurs m’a le plus bouleversé et j’ai toujours pensé qu’on devrait l’enseigner non pas dans les universités africaines, mais dans les écoles primaires.
Cet auteur s’appelle Giovanni Arrighi que certainement aucun Africain ne connaît aujourd’hui, alors qu’il est vital pour commencer à comprendre ce qui nous arrive.
Giovanni Arrighi est né le 7 juillet 1937 à Milan et mort le 19 juin 2009 à Baltimore, dans le Maryland, aux États-Unis où il était professeur d’économie à l'Université Johns-Hopkins de Baltimore depuis 1998.
Il commence sa carrière en 1965, recruté par l’Université de Londres, pour aller enseigner à la branche périphérique de l’Université, celui de leur colonie africaine, la Rhodésie, l’actuel Zimbabwe.
C’est ici qu’il comprend que par la façon dont le capitalisme est structuré, le rôle de l’Afrique n’est pas celui de devenir riche ou de cesser d’être pauvre, mais justement de rester pauvre afin que l’Europe soit riche.
Giovanni Arrighi est chassé de la Rhodésie pour subversion, par le gouvernement raciste, à cause de sa théorie qu’il a baptisée de « Deconnexion » décrit dans son premier livre intitulé : "The Political Economy of Rhodesia" traduit en italien avec le titre : "Struttura di classe e sovrastrutture in Rhodesia" (Structure et superstructure de classe sociale en Rhodésie) est écrit en 1965, c’est-à-dire, il y a 59 ans.
À travers cette théorie, du débranchement de l’Afrique de l’Occodent, Arrighi complète la phrase du début de cette leçon ainsi :
« Les dirigeants africains n’ont aucune chance de développer l’Afrique »,
à moins qu’ils se débranchent, qu’ils se séparent définitivement et totalement des pays européens qui les ont colonisés et privés de liberté.
Aucun pays africain ne sera développé même après 100 ou 200 ans, s’il ne réussit pas au préalable sa « Decconexion » de ceux qui le maintiennent dans la pauvreté, parce que c’est leur pauvreté qui alimente la richesse de l’Europe.
Pire, Arrighi explique ensuite pourquoi l’Afrique ne peut pas mettre en place cette déconnexion : à cause de ce que Mao a appelé : « la bourgeoisie bureaucratique », les fonctionnaires et les politiciens africains.
Le système a soigneusement mis en place une nouvelle classe sociale africaine. Ce sont les fonctionnaires et les politiciens. Dans des pays extrêmement pauvres, le système capitaliste et colonialiste européen s’est juste rassuré que cette bourgeoisie soit la seule à posséder un revenu garanti, au milieu de tant de misérables, d’indigents, de traîne-misère, de va-nu-pieds, ce qui témoigne aux yeux de nos fonctionnaires et politiciens tous les jours qu’ils sont des rescapés de la misère et donc, des chanceux.
Une fois qu’ils prennent conscience de cette prétendue « chance », affirme Arrighi, il ne sera plus besoin pour les colonisateurs européens de rester en Afrique pour contrôler la population, puisque ces chanceux seront déterminés à donner même leur propre vie, s’il en est besoin, afin que ce système perdure, se pérennise et fasse profiter aussi leurs enfants, leurs descendances.
Dès lors, l’objectif du développement de l’Afrique est relayé non pas au deuxième plan, mais au dernier. L’objectif de chaque Africain qui profite du système est son intérêt personnel et rien d’autre. La conséquence est que lorsqu’on dit que tel pays africain est le plus pauvre du monde, affirme Arrighi, ce qu’on oublie est que cela ne dit rien aux fonctionnaires et aux politiciens, pourvu qu’ils aient leurs gardes du corps, qu’ils circulent dans les rues, précédés par la sirène d’une moto ou d’une voiture, qui confirme leur statut, et le reste ne compte pas.
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