Si notre coopération avec la Chine consiste à lui demander de financer une autoroute dans cette région, c’est que nous sommes certains que nous ne pourrons jamais rembourser cet argent.
Est-ce que cela veut dire qu’il ne faut pas développer l’Est ?
Pas du tout. Cela veut juste dire que pour développer l’Est, puisque les ressources à disposition sont limitées, il faut éviter de les utiliser pour des investissements non productifs et la route n’est pas un investissement productif, si le montant du péage ne peut pas permettre de rembourser l’investissement initial.
Pire, si c’est pour abattre les arbres centenaires et sortir le bois, là se pose un double problème des ressources mal utilisées, d’abord parce que les arbres n’ayant pas été transformés sur place pour fabriquer par exemple les pianos ou les guitares, le gain que la communauté pourra tirer d’un produit brut exporté ne pourra jamais rembourser l’argent dépensé pour combler les trous laissés par les grumiers sur la route bitumée avec l’argent emprunté de la coopération avec la Chine.
Mais ce n’est pas fini.
Puisqu’en même temps, le Cameroun rembourse 50% de l’argent du carburant, le chef d’Etat Camerounais lors de son message à la nation le 31/12/2022 a parlé de 700 milliards de Francs CFA soit plus d’un milliard d’Euros pour subventionner les carburants pour 2022.
Cela veut dire que le pays emprunte l’argent au FMI pour rembourser les carburants utilisés par les entreprises étrangères pour qu’elles aillent détruire la route qu’on a construites avec les dettes contractées auprès de la Chine, pour aller vider la région de l’Est du Cameroun de son bois.
Quel genre de taxes faudrait faire payer ces entreprises non pas pour que la collectivité profite de leurs activités, mais pour que les dettes contractées soient un jour remboursées ?
C’est cela le vrai problème qui prive le pays des ressources à dédier au développement de la société. On s’est trompé de tout.
Et si les 109.000 km devenaient un bassin agricole au cœur de la coopération Cameroun-Chine, à l’image de la coopération Argentine-Chine qui a vu l’argentine produire 4 millions de tonnes de viande de porc, pour compenser la baisse de la production chinoise passée de 12 millions à 8 millions de tonnes en 2021 ?
Revenons à la Suisse pour mieux comprendre le problème.
Beaucoup de gens ne comprennent pas pourquoi la Suisse qui a l’un des PIB les plus élevés du monde et surtout, le salaire moyen le plus élevé du monde ne renonce jamais à son agriculture. C’est pour sortir des régions entières de la pauvreté et éviter qu’elles soient des régions assistées.
Aujourd’hui, la Suisse compte environ 14.817 kilomètres carrés de surfaces agricoles, soit environ 36 % du territoire national. 44 % du canton du Jura est dédié à l’agriculture, le versant septentrional des Alpes c’est 38,2 % et les Alpes centrales orientales c’est 31,4 % du territoire dédié à l’agriculture.
Ce choix est fait pour faire en sorte que les régions qui ne peuvent pas produire la richesse à travers des activités plus spécialisées, se rabattent sur l’agriculture, pour produire les richesses qui permettraient de financer les services sociaux, les autoroutes, l’alimentation en électricité au prix raisonnable pour la population et surtout, la potabilisation et la distribution de l’eau à toute la population.
Et donc, plus une région est destinée à être appelée « région pauvre » et plus on la sort de la pauvreté en la dédiant à l’agriculture. Et pour rendre l’agriculture rentable, il faut que soient construites dans la même région les usines de transformation.
Résultat des courses, aujourd’hui en 2022, la longueur du réseau routier suisse était de 84 675 km, dont 1544 km d'autoroutes. Le réseau ferroviaire mesurait 5.317 km en 2020, date du dernier relevé, parce que c’est chaque canton, c’est chaque région qui s’est donné les moyens de produire la richesse et de permettre que les infrastructures soient créées et contribuent ensuite à dynamiser l’économie. Là où en Afrique, les politiciens sont convaincus en bonne foi que c’est la route, c’est l’autoroute qui sera la solution miracle au développement.
Le ministère des Travaux publics du Cameroun annonce qu’en 2023, il y a 1 306,59 km de routes en terre en cours de bitumage, qui à la fin de l’année 2023, devrait renforcer le réseau routier bitumé, et le porter de 9 228,54 km à 10 535,13 km.
Lorsque nous mettons ce chiffre en relief et constatons qu’il s’agit de 10.535 km pour un total de 475.000 km2 du pays, contre 84.675 km de routes bitumées sur une superficie de 41.000 km2 pour la Suisse, on se rend compte de l’abyme qui sépare les deux pays. Et le solution ne sera jamais d’aller emprunter l’argent à la Chine ou à un autre partenaire pour monter ce chiffre de 10.535 km à 20.000 ou à 50.000 km, si on n’a pas eu au préalable l’intelligence de trouver les activités qui vont permettre de créer des nouvelles routes et d’en faire un cercle vertueux pour le développement.
Selon le ministère camerounais de l’agriculture, en 2020, l’Agriculture occupait 62% de camerounais et contribuait pour 17% du PIB du pays, alors que seuls 12,6% du pays sont cultivés, soit 6 millions d’hectares de plantation. C’est ici qu’on peut faire mieux. Et surtout, orienter une partie de la coopération avec la Chine.
Lire le contenu
....
Dernières nouvelles